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Le vent de révolution qui souffle dans le monde arabe a gagné Moroni. Ici, ce n’est pas la politique qui a révolté les gens mais la destruction programmée du Foyer des Femmes situé sur la Place de l’Indépendance.

Ces deux derniers jours, le parvis du Foyer des Femmes de Moroni ressemblait à la place Tahrir, symbole de la révolte égyptienne. Des dizaines de femmes, de jeunes et de vieux se sont amassés dans cet endroit pour protester contre la destruction programmée du Foyer des Femmes. Le mardi dans l’après-midi, dans un acte symbolique, un jeune est monté dans un des 4×4 de la gendarmerie venu les arrêter pour exposer quelques décisions. « Nous allons rester ici jusqu’à l’arrivée des autorités politiques pour qu’ils comprennent notre mécontentement », martèle ce jeune devant quelques centaines de personnes. Ce discours est tenu quelques heures avant la célébration du Maoulid du gouvernement qui était organisé justement dans ce Foyer. Mais pour comprendre cette fronde, il faut retourner quelques jours en arrière.

Depuis des semaines, les habitants de Moroni assistent, impuissants à un ballet de techniciens, architectes et ingénieurs en BTP qui se succèdent entre la faculté Imam Chanfii et la place Badjanani. Jusqu’à là, personne, en tout cas pas les riverains, ne sait ce qui se passe dans ce tronçon si ce n’est ce que véhicule la rumeur. Il a fallu attendre une rencontre avec un des ingénieurs arabes affecté à ce travail pour comprendre. Celui-ci a expliqué à une des femmes de Moroni,

que « le projet en question vise à construire un port de plaisance pour recevoir les touristes », ajoutant, à la grande surprise des habitants, que « le Foyer des Femmes sera rasé ». La gente féminine n’est pas restée les bras croisés. Une première rencontre avec les autorités a échoué et il s’est donc engagé « une révolution ».

Une réunion est organisée au Foyer Casm et les avis ont convergé vers « une action pour manifester l’indignation du fait que personne ne connait les tenants et les aboutissants de ce port et surtout contre le projet de raser le Foyer des Femmes, un des symboles de la ville». Le premier contact entre la population et les employés qui préparaient la pose de la première pierre prévue pour le lendemain par le chef de l’Etat, s’est soldée par une altercation que la gendarmerie a vite matée. On a malgré tout constaté qu'un technicien étranger a été blessé à l’arcade sourcilière. C’est à ce moment que les habitants de la capitale (Badjanani-Mtsangani) ont improvisé un sit-in pour interpeller l’opinion et les autorités.

Un premier membre haut placé du régime explique que « le gouvernement a tant promis et il n’a pas réalisé. Cette fois, le gouvernement a voulu faire une surprise ». Quelque temps après, une autre autorité vient déclarer que « le foyer allait être rasé mais avec le consentement des femmes de Moroni». Mais loin de s’affaiblir, le mouvement s’est reconstitué encore hier matin. Après une rencontre avec le gouvernement, le ministre des finances annonce que « c’est le pays qui a perdu car les investisseurs ont décidé de suspendre les travaux et la pose de la première pierre ». Et le ministre de l’économie d’assurer en exhibant la maquette «qu’il n’a jamais été question de démolir le foyer ».

C’est en ce moment que les habitants de la ville découvrent le projet. Il s’agit d’un port, d’un hôtel, d’un terminal, bref tout ce qu’on a vu dans le projet de la Corniche dont le responsable est d'ailleurs le même. Mais bizarrement, malgré les affirmations du gouvernement, le Foyer n’existe pas dans la maquette. A la place, on a prévu une piste pour hélicoptères. A la fin, le gouvernement s’engage à fournir « un écrit qui certifie que le foyer ne sera pas démoli». Mais les habitants de Moroni exigent aussi une étude d’impact « pour comprendre les avantages et les inconvénients de ce projet ». En attendant, les travaux sont suspendus.

A.A. Mguéni

(Source : Malango Actualité)